La cannabis est connue pour sa effets marqués sur le corps humain. Tantôt considérée comme une immense opportunité, tantôt diabolisée, elle doit en grande partie sa réputation à une famille de molécules qui agissent directement sur l’organisme : cannabinoïdes. Mais le chanvre est-il vraiment la seule espèce végétale à en produire ? La réponse est en fait plus claire qu’il n’y paraît, mais il y a sans aucun douteautres plantes aux effets similaires ! Un bref aperçu.

Le cannabis n’est pas la seule plante à produire des cannabinoïdes
Cannabinoïdes et phytocannabinoïdes : quelle est la différence ?
Le terme phytocannabinoïdes s’oppose à celle deendocannabinoïdes, molécules aux effets identiques, mais produites par les animaux et les humains et non par les plantes. Les phytocannabinoïdes se distinguent également des cannabinoïdes artificiels, ou synthèse, également produite par l’homme, mais cette fois en laboratoire et non naturellement. Ils sont donc tout simplement cannabinoïdes produits par les plantes.
Les phytocannabinoïdes, les endocannabinoïdes et les cannabinoïdes artificiels sont donc tous indistinctement des cannabinoïdes. Le qualificatif qui leur est ajouté ne mentionne que leur lieu de production. Dans tous les cas, il s’agit de produits chimiques capables deactiver notre système endocannabinoïde (SEC), intervenant notamment danséquilibre de notre système nerveux et de notre système immunitaire.
Les plus connus d’entre eux sont les ré9‐Tétrahydrocannabinol (THC) et cannabidiol (CDB). Pourtant, il en existe des dizaines, voire des centaines, toutes ayant des effets plus ou moins marqués et divers sur notre organisme.
Est-ce qu’on t’a perdu en chemin ? Pas de problème, c’est technique. Nous résumons.
Différents types de cannabinoïdes
- phytocannabinoïdes: ils sont produits par des espèces végétales, principalement le cannabis. Parmi eux se trouvent les bien connus CBD et THC, mais aussi le cannabigérol (CBG), le cannabinol (CBN) et probablement quelque 200 autres molécules.
- endocannabinoïdes : ils sont produits par le corps de l’homme et de nombreuses espèces animales, dont les mammifères.
- Cannabinoïdes synthétiques : ils sont produits en laboratoire, par synthèse de molécules.
Et le cannabimétique dans tout ça ?
Il n’est pas rare non plus de lire ou d’entendre le terme cannabimimétiques. Il s’agit simplement d’un terme créé pour désigner des molécules dont la composition ressemble étrangement à celle des cannabinoïdes, à tel point qu’elles peuvent aussi agir sur le système endocannabinoïde. Comme ils « miment » les effets des cannabinoïdes, on parle souvent de mimétisme, ce qui leur a valu leur nom.
Le terme a connu une certaine vulgarisation après la parution d’une étude publiée en 2010 par la Journal britannique de pharmacologie intitulé Phytocannabinoïdes au-delà du Cannabis plante – existent-elles? (« Les phytocannabinoïdes au-delà de la plante de cannabis – existent-ils ?). Leur étude a prouvé que la SEC peut être activé par d’autres molécules que les endocannabinoïdes (cannabinoïdes produits par le corps humain) ou les cannabinoïdes maintenant connus produits par le cannabis (CBD, THC et bien d’autres).
Quelques protéine, acidesmais aussi terpènes peut ainsi interagir avec l’un et/ou l’autre des capteurs SEC (appelés CB1 et CB2), pour effets plus ou moins marqués. C’est ce qui vaut souvent la peine réputation d’autres plantes pour la production de cannabinoïdes. En fait, il est plus juste de parler de cannabimétique.

Les astéracées produisent des molécules de type cannabinoïde
Anandamide : responsable des effets des cannabinoïdes ?
L’anandamide est un autre nom barbare. En effet, derrière les nombreux noms scientifiques tentant d’expliquer le rôle des cannabinoïdes et leurs effets sur le corps humain, tout n’est pas aussi compliqué qu’il n’y paraît.
Anandamide : un neurotransmetteur endocannabinoïde
Très simplement, laanandamide est un neurotransmetteur produite par notre organisme et celui des animaux. Pourquoi est-ce ? Son rôle n’est pas encore totalement défini, cependant il semble être produit par notre cerveau pour des tâches aussi différentes que réguler notre alimentation, augmenter notre niveau de motivation ou encore libérer une sensation de plaisir. Elle aurait aussi un action anti-inflammatoire sur le corps. Les premières études montrent que la prise de paracétamol pourrait déclencher notre production d’anandamide et que c’est en partie pour cela que c’est un analgésique efficace sur le corps humain.
Son fonctionnement est donc similaire à d’autres neurotransmetteurs que nous connaissons mieux, comme la dopamine qui « récompense » certaines de nos actions bénéfiques par une sensation de plaisir (manger sainement, gagner un concours, etc.). De même, notre cerveau produit de l’adrénaline lors d’un stress ou d’un effort physique intense afin de nous donner la force nécessaire pour franchir l’obstacle.
Quel est le lien entre les cannabinoïdes et notre corps ?
Eh bien, l’anandamide n’est pas seulement un neurotransmetteur, mais aussi un endocannabinoïde. Il se lie donc aux capteurs CB1 de notre système endocannabinoïde, au même titre que le THC. Il est aussi, dans une moindre mesure, capable d’agir sur les capteurs CB2, comme le CBD.
Cela nous permet de tirer deux types de conclusions :
- En activant notre système endocannabinoïde, les cannabinoïdes simulent l’action de l’anandamide et expliquent en partie de nombreux effets (faim, relâchement musculaire, relaxation).
- D’autres molécules similaires peuvent avoir des effets similaires, même si elles ne sont pas à proprement parler issues du cannabis..
On se rabat donc sur nos cannabimétiques, que l’on trouve partout dans la nature… et même dans des médicaments comme le paracétamol !
Fleurs, herbes, champignons : quelques variétés productrices de cannabinoïdes (ou presque)
Quel que soit le nom qu’on leur donne, de nombreuses variétés de plantes, et même des champignons, sont capables d’agir sur notre organisme grâce au SEC. Voici quelques exemples.
Astéracées (fleurs de la famille des marguerites)
Si leur nom vous est inconnu, vous les avez certainement aperçus dans un jardin. Les astéracées sont en effet très communes en raison de leurs pétales roses très décoratifs. Originaires des Etats-Unis, elles sont pourtant appréciées au-delà de leur esthétisme puisqu’elles peuvent activer les récepteurs CB2 grâce à leur propriétés anti-inflammatoires similaires à celles du THC. Ils sont notamment utilisés pour soulager certaines douleurs, réduire l’inflammation et apaiser les piqûres d’insectes. Attention toutefois à ne pas les consommer sans précautions : ils peuvent aussi entraîner des troubles digestifs, des réactions allergiques, voire des problèmes respiratoires.
Cacao
La réputation du chocolat comme provocateur de plaisir n’est plus à faire. Elle est principalement due aux propriétés du cacao, contenant notamment ce qu’on appelle communément » molécule du bonheur « . Il produit aussi directement de l’anandamide, ce qui explique en partie sa effets sur la mémoire, les émotions ou l’activité motrice. Le cacaoyer en produit également deux aux effets apparemment similaires : la N-oléoyléthanolamine et la N-linoléoyléthanolamine.
Truffe noire
La truffe noire, contrairement à ce que laisse entendre son goût, a des points communs avec le cacao. Bien plus ancien que le chanvre, ce champignon produit pourtant, selon des chercheurs italiens, une Molécule source de bonheur capable de se lier aux récepteurs CB1. La truffe noire a aussi la particularité d’être une espèce particulièrement ancienne. Les scientifiques estiment son apparence à plus de 150 millions d’années, soit le double de celle du cannabis !

La truffe noire pourrait contenir des cannabinoïdes, ou plutôt des cannabimétiques
Poivre noir
De nombreuses variétés de cannabis cultes se distinguent par des notes prononcées de poivre. Plus qu’une coïncidence en termes de saveurs, le poivre et le chanvre partagent en fait un terpène commun : bêta-caryophyllène, connue pour son odeur puissante et très particulière. Il est également réputé pour ses qualités anti-inflammatoires. Il n’est donc pas étonnant que les premières études suggèrent qu’il serait capable de se lier aux récepteurs CB2.
Rhododendrons et azalées
Rhododendrons et azalées ne sont pas seulement bons pour fleurir les jardins de nos grands-parents, ils produisent aussi des cannabinoïdes ! Encore plus surprenant, ils produisent également des terpènes, des flavonoïdes et des tanins qui le rapprochent sur certains points du cannabis. Particulièrement puissant par ses effets, le rhododendron a même longtemps figuré sur la liste des remèdes traditionnels à base de plantes, mais c’était avant que l’herboristerie ne disparaisse complètement du paysage médical français.
Hépathique
La foie sont des plantes originaires de Nouvelle-Zélande et occupant une place très particulière dans la culture maorie. Plante sacrée pour les Maoris, elle suscite des interrogations, voire la crainte des autorités néo-zélandaises qui s’interrogent encore sur l’éventuelle interdiction de la plante. Malgré des effets moins puissants que ceux du cannabis sauvage, les hépatiques produisent en effet un composé chimique (perrottetinène) relativement proche du THC. En attendant les résultats de recherches scientifiques approfondies, les Maoris peuvent continuer à cultiver et à utiliser les hépatiques comme ils l’entendent.
Mafane Brèdes
Cette plante jaune aux centaines de petites fleurs attachées les unes aux autres est très appréciée au Brésil, où elle est utilisée à la fois comme plante médicinale et comme ingrédient dans certaines recettes traditionnelles. En Europe, on a tendance à ignorer son existence, mais certains la connaissent comme » plante contre les maux de dents « . Il produit en effet une substance relativement proche de certains cannabinoïdes et est capable d’induire l’euphorie chez ses consommateurs. Plus intéressant, son effets anti-inflammatoires ou, dans ce cas, un engourdissement, soulagerait certaines douleurs dont les maux de dents en seulement quinze minutes.
Le houblon produit-il du CBD et d’autres cannabinoïdes ?
Entre 2018 et fin 2020, une véritable saga judiciaire a été au centre des intérêts de l’industrie du cannabis et des amateurs de produits à base de cannabis. Une entreprise américaine a affirmé avoir réussi à extraire le CBD du houblon, l’un des principaux ingrédients de la bière. L’enjeu était énorme : extraire les cannabinoïdes en grande quantitéun coût potentiellement faible et, surtout, d’une plante très courante et parfaitement légale.
Après quelques rebondissements médiatiques, une enquête de longue haleine et une série de procès, il s’est avéré queil n’y a jamais eu de cannabinoïde extrait du houblon. Dommage toutefois que l’entreprise ait commencé à commercialiser ses produits sous le nom de « CBDx™ », un pseudo cannabinoïde extrait de plantes qui ne sont pas du cannabis légal. Cela ne vous rappelle pas quelque chose ? Bingo, cannabimétiques !
Pour ceux qui seraient trop déçus de cette nouvelle, sachez toutefois qu’il est désormais possible de se désaltérer avec une bière au chanvre. Oubliez les effets massifs des cannabinoïdes, cependant.
Mauvaise réputation du cannabis : pourquoi est-il le seul à en souffrir ?
La cannabis est de loin la plante qui a le la production de cannabinoïdes la plus abondante et la plus variée. Bien que ses effets secondaires semblent moindres que certains des exemples cités ci-dessus, c’est aussi le plus stigmatisé. Cela est probablement dû à son impressionnante collection de cannabinoïdes (probablement plus de 200), produits par une seule et même plante. C’est aussi la faute de effets marqués et, surtout, à sa renommée mondiale.
Seul un segment limité de la population mondiale en consomme. Pourtant, il n’y a pas un pays, pas une culture, qui ne connaisse la plante et ses effets. La autres variétés présentés ici, au contraire, n’ont qu’un production plus anecdotique de cannabimimétiques, et surtout des caractéristiques peu connues du grand public, ou seulement localement. La longue tradition de domestication, de culture et d’hybridation du chanvre à travers le monde lui doit sa (bonne ou mauvaise) réputation à travers le monde.
La développement du marché légal du cannabis encourage aujourd’hui l’arrivée sur le marché de nouvelles variétés riches en CBD et presque dépourvu de THC. Dans favoriser les effets bénéfiques de l’un (apaisement, relaxation, anti-douleur) et gommant les effets planants ainsi que le caractère addictif de l’autre, la lumière de cannabis pourrait bien enfin permettre au cannabis de se débarrasser de sa mauvaise réputation.
Les décennies à venir devraient donc être décisives pour notre regard sur le végétal, et peut-être aussi nous permettre de bénéficier des vertus d’autres plantes encore trop méconnu.